Rousseau est en pension à Bossey, en Suisse, de 1722 à 1724, chez le pasteur Lambercier. Rousseau vit deux années d'un bonheur serein. Mais un jour, il a la révélation traumatisante de l'injustice à laquelle le présent et le passé s'interpénètrent. Il attribut une importance décisive sur son affectivité et qui éclaire à la fois sur son ouvrage et sur sa vie. On pourra analyser successivement le récit de cet incident puis son analyse par Rousseau et enfin la fonction de ce passage.
Nous étudierons tout d'abord l'art de raconter de Rousseau
puis le rôle des exagérations.
Le temps utilisé est le présent de l'écriture et
de l'autobiographie. Les sentiments sont affectifs, Rousseau utilise
notamment des verbes de perception et les termes "sens" et
"sentiments" sont présents. Les souvenirs de Rousseau ont un
caractère indélébile, c'est pourquoi le
passé et le présent se mélangent par le biais de
l'écriture. Son émotion resurgit.
Rousseau utilise des exagérations comme : "poignardé",
"dussé-je cent fois y périr" et des modalisateurs qui
soulignent le caractère ineffaçable de ses souvenirs :
"100 000 ans", "toujours présent". Ces procédés
ont pour rôle de monter que Rousseau porte la blessure de cet
événement.
Rousseau analyse cet événement en employant un
décalage temporel entre l'écriture et
l'événement : "cinquante ans de cette aventure".
Il en fait plusieurs analyses qui comportent quelque chose de
caricatural : on ne peut pas appliquer les mêmes règles
aux animaux et aux humains : "Je me suis souvent mis en nage à
poursuivre à la course ou à coups de pierre un coq, une
vache, un chien, un animal que j'en voyais tourmenter un autre,
uniquement parce qu'il se sentait le plus fort", Rousseau a un soucis
excessif de l'injustice, il irais poignarder au péril de sa
vie les misérables : "Quand je lis les cruautés d'un
tyran féroce, les subtiles noirceurs d'un fourbe de
prêtre [on peut noter que Rousseau n'aime pas trop la
religion ], je partirais volontiers pour aller poignarder ces
misérables, dussé-je cent fois y périr."
Ce passage n'est pas vraiment une confession. Rousseau y critique
la société adulte qui est présentée comme
injuste et incohérente dans son éducation, si bien
qu'il est incapable d'évaluer l'importance d'un délit,
les adultes ont un rôle négatif.
Rousseau veut se réhabiliter parce qu'il a laissé une
image de menteur, il veut se libérer de sa
culpabilité.
Ce texte a une portée didactique : on a ici une
réflexion sur la personnalité adulte à partir
d'un épisode d'enfance.