- présentation d'Antigone ( = héroïne)
- présentation d'Ismène
- présentation d'Hémon
- présentation de Créon
- présentation de sa femme Eurydice, de la nourrice, puis du petit page de Créon
- présentation des trois gardes
La présentation des personnages s'effectue par ordre de proximité avec Antigone. Eurydice est quand même présentée alors qu'elle n'interviendra pas dans la pièce. La nourrice qui était pourtant avec Antigone depuis sa jeunesse n'est mentionnée qu'après Eurydice, ceci s'explique sans doute par le fait que la nourrice ne fait pas partie de la famille royale.
Le Prologue est comme le "réalisateur" de la pièce. La distance
avec Sophocle est marquée par la familiarité des attitudes des personnages, les gardes jouent aux
cartes, et Ismène bavarde, et aussi par les anachronismes.
Normalement, lors de la scène d'exposition, les personnages principaux et l'intrigue sont exposés
par un dialogue qui ne s'adresse pas directement au public. Dans Antigone, elle est beaucoup plus schématique,
elle est traitée d'une manière moderne, les personnages sont présentés de manière
organisé par ordre de proximité avec Antigone et l'un après l'autre.
Tous les personnages sont sur la scène, mais ils sont là comme si ils n'étaient pas encore
en représentation mais en coulisses.
On peut aussi noter l'écart entre le personnage d'Antigone et son actrice : "Elle pense. Elle pense
qu'elle va être Antigone tout à l'heure", "il va falloir qu'elle joue son rôle jusqu'au
bout..." La distance entre spectateurs et acteurs est marquée : " de nous tous, qui sommes là
bien tranquilles à la regarder, de nous qui n'avons pas à mourir ce soir" Le vocabulaire du
théâtre est utilisé ce qui ne nous permet pas d'oublier qu'on est au théâtre.
Le suspense a été "cassé". Mais, en fin de compte, non, comme on connaît l'histoire,
on a comme une espèce de supériorité par rapport aux personnages, et on ne connaît pas
les réactions qu'ils vont avoir durant la scène. Anouilh le dit lui même dans Œdipe ou
le Roi boiteux (cliquez ici pour voir l'extrait où il en parle
). Par ailleurs, on sait qu'on va voir une tragédie : la mort
des personnages est annoncée et ils n'ont aucune issue pour y échapper.
Anouilh veut faire quelque chose de nouveau avec Antigone : il a écrit en prose avec un registre courant
à familier alors que traditionnellement, les tragédies sont écrites en vers et avec un registre
soutenu ; on découvre de nombreux anachronismes dans son œuvre comme : les trois gardes qui jouent aux cartes
alors que les cartes n'existaient pas de ce temps - là et ils ont un chapeau au lieu d'un casque ; la reine
tricote au lieu de s'occuper d'amour ou de politique, les gardes nous parlent de leurs enfants et de leurs femmes,
ce qui ne se faisaient pas dans la tragédie classique, on nous dit qu'Ismène aime danser, ce qui
est joyeux, alors que la tragédie doit être tragique ; on nous dit aussi à propos des gardes
qu'ils "sentent l'ail, le cuir et le vin rouge", Anouilh traite les gardes sous un angle familier et
en plus ils auront le droit à la parole dans le texte, alors que dans la tragédie classique, ils
n'ont pas le droit de s'exprimer et on ne parle pas du tout de leur vie privée.
Composition de la famille royale :
Antigone et Ismène sont 2 sœurs mais elle s'éloigne à vitesse vertigineuse
d'Ismène ("elle sent qu'elle s'éloigne à une vitesse vertigineuse de sa sœur Ismène"
), le Roi aussi est seul, Antigone et Créon, son oncle, sont donc tous les deux seuls, et cette solitude
est fondamentale.
Personnage(s) d'Antigone : Antigone petite a un "sourire triste", des "yeux graves", elle est
"noiraude", "renfermée", "maigre" et "petite", c'est l'image de
l'antihéros, tous ces adjectifs qualifiant Antigone connotent la mort, le tragique. Par une espèce
de métamorphose, l'Antigone de mythe va "se dresser seule en face du monde", "elle va surgir",
c'est vraiment une héroïne. Cette différence est beaucoup plus importante que la différence
entre l'Antigone petite et sa sœur Ismène dont elle s'éloigne d'ailleurs à vitesse vertigineuse,
Ismène est jeune et aurait bien aimé vivre. Antigone est destinée à mourir dès
sa naissance, c'est pourquoi elle est indifférente lorsqu'elle rencontre Hémon.
Hémon : C'est quelqu'un qui restera un peu mystérieux dans toute la pièce. On peut se demander
si il aime vraiment Antigone. Le Prologue nous apprend qu'ils ne se marieront pas et que s'il n'avait choisi Ismène,
il ne serait pas mort. Il est comme une espèce de pantin, il n'a pas de pouvoir alors qu'il est prince et
destiné à devenir roi. C'est encore le petit garçon de son papa et de sa maman. Il n'existe
pas vraisemblablement et son titre princier n'est qu'une apparence. Hémon se plie devant Antigone. Il n'a
rien du jeune prince qui a de la consistance.
Eurydice : elle ne sait pas qu'elle va mourir, le regard porté sur Eurydice diffère nettement du
regard qui est porté sur Hémon. On dit toujours Madame mais jamais la reine. On a l'impression que
la tragédie se passe à côté d'elle et qu'elle ne la concerne pas. Elle est "bonne",
"digne" et "aimante" mais cela ne la sauve pas de l'inutilité.
Créon : il ne peut s'appuyer sur personne : son fils est sans consistance, "seul avec son petit page
qui est trop petit et qui ne peut rien non plus pour lui." Créon est le seul qui va monter une argumentation
contre Antigone, c'est le Roi mais en fin de compte, il ne l'assume pas complètement, il se demande d'ailleurs
si ce n'est pas vain de conduire les hommes. C'est un homme cultivé, il est assez ouvert et il a accepté
par devoir le poste de roi.
Le Messager : il sait déjà, c'est lui qui viendra annoncer la mort d'Antigone. C'est une témoin
privilégié. On peut encore noter un anachronisme : on sait quelque chose sur lui : il a le droit
de rêver, d'avoir des envies et de n'avoir pas envie de faire son devoir, d'être pâle et solitaire.
Les gardes : Ils ne sont pas complètement réduits à leur fonction, on parle de choses dont
on ne parlerait jamais dans la tragédie classique. Coté quotidien : Ils sentent l'ail, le cuir et
le vin rouge. Anouilh insiste sur le fait qu'ils sont toujours innocents et toujours satisfaits d'eux-mêmes,
de la justice. Ils ne se posent pas de questions sur l'existence. "Ils sont dépourvus de toute imagination".
Anouilh insiste aussi sur leur lourdeur.
Écart entre l'image classique que l'on a des personnages par rapport à la tragédie classique où l'on ne présente que les personnages nobles : on n'aurait présenté qu'Hémon, Créon, Eurydice, Antigone et Ismène. Exceptée Antigone, les personnages sont caractérisées par leur banalité. Dans la tragédie classique, ils sont plutôt sublimes. La conception du pouvoir est différente : dans la tragédie classique, on se bat pour le pouvoir et ici, le pouvoir est perçu comme un fardeau qu'il faut accomplir tous les jours.
Dans la suite de la pièce, Créon essaye de composer avec Antigone, il essaye
de la sauver. Anouilh a voulu mettre plus d'humanité dans la tragédie.
La pièce est désacralisée : on a enlevé le coté exceptionnel des personnages
de tragédie qui ne sont pas humains mais surhumains. On y faisait un mythe des personnages. Le tragique
de la pièce va se concentrer dans le personnage d'Antigone, les autres personnes tiennent à leur
humanité.